Comment apprendre à lâcher prise ?

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Obsession de la perfection, volonté de contrôler son existence dans tous ses détails… Nous sommes de plus en plus nombreu(x)ses à vouloir tout maîtriser. Au risque de perdre pied. Pourquoi et comment lâcher du lest ? 

Apprendre à lâcher prise

A force de tout vouloir maîtriser, on peut perdre pied.
Getty Images/iStockphoto

Aline, chef de projet dans la pub et mère de deux jeunes enfants, ne peut pas s’endormir le soir sans vérifier que sa liste des choses à faire dans la journée est bien terminée. Ce qui implique par exemple d’avoir pris un rendez-vous chez l’orthophoniste pour sa petite dernière, vidé le lave-vaisselle, lancé une machine de blanc, préparé sa présentation pour sa réunion de travail du lendemain et prévu les menus de la semaine, si possible avec “un maximum de légumes“. “Je me rends bien compte que je me prends la tête pour tout, mais impossible de m’arrêter, même si je m’épuise moi-même“, confie la jeune femme. David, cadre dans une banque, reste pour sa part des heures au boulot, “incapable de partir avant d’avoir relu chaque dossier client et d’être bien sûr qu’il n’y a aucune erreur“. Il est par ailleurs de son propre aveu “ultra exigeant” avec ses enfants et s’angoisse à la moindre de leurs mauvaises notes, convaincu que leur avenir est fichu s’ils descendent en deça de 16/20. 

Aline et David sont chacun à leur manière ce qu’on appelle des control freaks. Leur équilibre personnel semble tenir sur une corde raide prête à rompre à la moindre défaillance.

Comment expliquer cette obsession de la perfection, comment, également, parvenir à lâcher prise, selon l’expression consacrée ?  

La réponse à un discours dominant qui vante le contrôle dans tous les domaines

Cette question est plus difficile qu’il n’y paraît à traiter“, prévient Lysiane Panighini, psychopraticienne. “En effet, constate-t-elle, ce concept du contrôle à tout prix émerge véritablement depuis quelques décennies et prend de plus en plus d’ampleur dans la vie des gens“. S’appuyant sur une approche “narrative” de la psychologie, Lysiane Panighini, part du postulat que “certaines attitudes et comportements se co-construisent à partir d’un contexte sociétal, religieux, familial, communautaire, etc.” 

Tout le monde a pu et peut constater un discours dominant expliquant qu’il est bon de contrôler ou dominer ses affects, ses émotions, sa prise d’alcool, son poids et qu’il faut être parfait en tout, (corps, culture, études )“. Le message subliminal sous-jacent étant, poursuit la psychopraticienne, “grâce à cela, vous serez aimé, admiré, vous ne serez jamais malade, vous ne serez jamais triste, vous ne serez jamais trompé(e)“. En bref, “vous accéderez au bonheur, à la plénitude et serez parmi les meilleurs“. 

Une volonté illusoire d’influer sur le cours de sa vie

A la notion de contrôle, précise en effet Lysiane Panighini, s’ajoute non seulement celle de perfection mais aussi celle de pouvoir. “Contrôler donne une illusion de pouvoir sur les événements de la vie, l’idée étant : « tant que je contrôle, rien ne peut m’arriver »“. C’est ainsi que, constate-t-elle, certaines personnes créent “tout un tas de pares-feux, de gardes-fous, de balises de toutes sortes pour que tout soit parfait“. Ceci notamment afin “de voir le meilleur de soi dans le regard de l’autre et d’exister ainsi“. 

Une analyse qui parle à Marion, 34 ans : “J’ai cette impression que si les autres, mes proches, mes collègues, admirent ma maîtrise de tout, envient mon organisation au cordeau, cela valide mes choix. J’ai besoin de cette approbation, d’être finalement, comme lorsque j’étais enfant, « une bonne élève »”. 

Le risque : que tout s’effondre au moindre imprévu

Problème : cette pression que les perfectionnistes s’infligent arrive souvent à un point de non retour, avec le risque que la mécanique bien huilée se grippe. Et là souvent, c’est le drame. Cécile est ainsi tombée en dépression après une déconvenue professionnelle : “J’avais préparé un événement durant des mois, ne négligeant aucun détail, y consacrant mes journées et souvent mes nuits. Et puis le jour J, évidemment, tout ne s’est pas passé exactement comme prévu, le traiteur a été en retard, un intervenant s’est décommandé. Et soudain, le monde s’est ouvert sous mes pieds, j’ai eu la conviction de n’être qu’une énorme erreur. J’ai mis des mois à remonter la pente, à me pardonner des choses dont je n’étais pas responsable, à accepter que je ne pouvais pas tout contrôler, en réalité.” 

Le risque de cette obsession du contrôle est en effet la dévalorisation de soi, la culpabilité de ne pas atteindre cette perfection qui n’est évidemment pas de ce monde“, commente Lysiane Panighini. Autre conséquence, ajoute-t-elle, “un seuil de frustration très bas” : “la colère ou l’angoisse surviennent dès que les choses ne se passent pas comme on a décidé qu’elles devaient se passer“. Avec à la clé, des réactions disproportionnées

Le “lâcher prise“, quelque chose qui ne se décide pas

Pour tenter de sortir de cette prison de la perfection dont on s’enferme souvent de notre plein gré, il est souvent recommandé de lâcher prise. Un concept également “assez nouveau et que l’on retrouve dans bon nombre de livres, qui vous expliquent comment lâcher prise en 10 leçons“, observe Lysiane Panighini. Ce qui est, souligne-t-elle, un non-sens total. “Le lâcher-prise ne peut relever d’un acte volontaire. C’est comme si l’on disait à quelqu’un « Sois spontané ». Le lâcher-prise ne s’apprend pas, c’est un état d’être ou un état d’esprit, je dirais, apaisé, avec lequel on se sent en congruence, sans révolte.” En somme, une acceptation de ce qui est. Sans tomber donc dans les solutions toutes faites, Lysiane Panighini essaie d’aider ses patients à “mettre la barre moins haute et à descendre le curseur de leurs exigences“. 

Trouver l’origine de cette obsession de la perfection

Il s’agit dans un premier temps de “déconstruire ce comportement que l’on peut résumer par « je veux tout contrôler et être parfait(e) »“, de façon à ce que la personne se rende compte que le problème “ne vient pas d’elle, mais d’un contexte.” Il n’est évidemment pas question de porter un jugement “mais de se dé-identifier du problème, de s’en désolidariser“.  

Identifier les effets néfastes de cet excès de contrôle

Ensuite, poursuit Lysiane Panighini, “nous identifions les effets de ce comportement dans la vie de la personne et de ceux qui l’entourent“. Par exemple, est-ce que cela lui fait faire des choses qu’elle n’a pas envie de faire ? Est-ce que cela nuit à son couple, à ses relations de travail ? Est-ce que sa volonté de tout contrôler va parfois à l’encontre de ses valeurs, comme la compassion, l’empathie, le plaisir de profiter simplement de la vie ? 

L’intention du travail étant que la personne se reconnecte avec ses valeurs, dont le problème la coupe sans qu’elle s’en rende véritablement compte.” De cette façon, l’enjeu n’est plus de “lâcher prise” mais d’être à nouveau en cohérence avec soi-même, de retrouver de l’agrément. Existe-t-il en effet meilleure motivation pour changer que celle de jouir d’avantage de l’existence

Se rappeler du temps où l’on ne cherchait pas à tout maîtriser

Enfin, dernière étape de la thérapie proposée par Lysiane Panighini, tenter de se rappeler d’une époque où l’on n’était pas dans ce type d’excès de perfectionnisme. “On fait alors prendre conscience à la personne qu’elle a su faire “autrement” à certains moments de sa vie, et que cela avait très bien fonctionné, sans inconvénients majeurs“. “Lorsque cette prise de conscience est faite, cela va assez vite dans le bon sens“, assure Lysiane Panighini. 

Sophrologie, kinésiologie, pleine conscience… des approches pour prendre du recul

D’autres approches sont également envisageables. Carine Dufour est sophrologue et assure que cette méthode de relaxation et de développement personnel est “très efficace” et l’a été sur elle. Juliette confirme : “j’ai testé pendant ma grossesse (on ne contrôle rien pendant sa grossesse, un cauchemar pour une control freak !). Cela m’a énormément aidée, rassurée, obligée à lâcher du lest et à me projeter dans l’avenir pour accepter de ne pas avoir de prise sur le présent“. 

Maud, qui termine ses études de kinésiologie, en vante pour sa part les bienfaits : “les kinésiologues se concentrent sur la façon d’équilibrer l’énergie dans l’organisme, c’est une approche qui s’inspire de la médecine chinoise. Cela permet de résoudre certains problèmes émotionnels, de lutter contre des blocages, en prenant conscience que le corps est un tout. En agissant sur le corps, la kinésiologie permet de réduire le stress, souvent à l’origine de cette volonté de tout contrôler“.  

David quant à lui a découvert la pleine conscience. Cette technique de méditation lui a fait découvrir “la nécessité de s’arrêter parfois, de prendre du recul et d’être simplement dans l’instant présent et non plus dans l’anticipation permanente“. Il continue à vérifier scrupuleusement ses dossiers, mais parvient également à “mettre de côté ce qui ne mérite pas de se ronger les sangs“, à lâcher du lest, à rentrer plus tôt chez lui et à ne plus paniquer dès que son fils “ramène des notes en dessous de la moyenne“. Un bon début. 

La plupart des gens assimile souvent le lâcher prise à la capacité à cesser de contrôler, de s’accrocher, de retenir… C’est aussi être capable d’accepter de nouvelles situations, de pardonner, de renoncer… Toutes choses parfois difficiles à faire seul !

L’hypnose vous aide à prendre de la hauteur, à vous détacher des événements passés et présents pour aller de l’avant, à accepter que la vie, par certains côtés, est surprise et étonnement, et qu’elle apporte bien plus de bonheur dans ce registre.

2 réflexions sur « Comment apprendre à lâcher prise ? »

    1. Admin Auteur de l’article

      Non, ce n’est pas normal, le site s’affiche normalement sur les PC (Windows 7, 10, Linux sous Internet Explorer ou Firefox) que j’utilise pour vérifier mes articles… Autrement, la source de l’article est toujours citée tout en bas, référez-vous y ?
      Merci pour l’intérêt que vous manifestez pour cet article de mes actualités, et bonne continuation !

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