Éthique et hypnose en Picardie

Peut-être avez-vous entendu parler de cette jeune fille, en Picardie, qui a fait l’objet d’une attention particulière en raison de ses endormissements provoqués par l’injonction hypnotique d’un “camarade” pratiquant l’hypnose de rue ?
J’ai longuement réfléchi avant d’en parler ici. Et puis, comme j’en ai déjà parlé ici, je trouve que finalement, ça complète bien le panorama de ma pratique du point de vue éthique.

Car de fait, s’il est évident que l’hypnose thérapeutique en cabinet n’est pas de l’hypnose de rue, c’est toujours de l’hypnose. Et l’amalgame pourrait être si facile, n’est-ce pas ? J’entends régulièrement, en cabinet, l’inquiétude “allez-vous me faire faire des choses… ?” Oh oui, je vais vous faire faire des choses 🙂 : “Imaginez que vous êtes sur une longue plage de sable blanc, illuminée par un soleil chaud, et l’eau salée et tiède de l’océan transparent“… “Percevez votre corps qui se détend, muscle après muscle, doucement, confortablement“… “Voyez cette petite fille/ce petit garçon que vous étiez à cinq ans et dont votre mère garde tendrement la photographie“…

Et parce que vous me faites confiance pour vous accompagner dans votre changement, je vais prendre soin de vous pendant les quelques instants où vous irez à la recherche de vos propres solutions. En étant éthique, pour mériter votre confiance.

Alors soyons honnêtes sur ces quelques points :

1. Oui, l’hypnose est un outil puissant. Et comme tout outil, a fortiori quand il est puissant, il peut être mal utilisé, voire même dangereux

De ce fait, j’ai préféré choisir une formation solide et sérieuse dans un institut de formation réputé et reconnu pour son exigence. Je me suis formée à la psychopathologie, et ai des correspondants dans différentes spécialités médicales.
Et dans ma pratique, comme je le précise sur cette page, je me réserve le droit de décliner votre demande d’accompagnement si je ne m’estime pas légitime. Je me permets d’ailleurs de vous adresser à un confrère ou à un spécialiste si je le juge nécessaire. Entre autres, je ne soigne pas, je ne guéris pas, je ne fais pas de miracle. Je vous aide simplement à franchir une marche qui vous semble juste un peu trop haute pour vous à cet instant.

2. L’hypnose nécessite des précautions d’usage

Il ne viendrait à l’idée de personne de confier une tronçonneuse à un enfant, ou une Ferrari à un adolescent, n’est-ce pas ? Parce que ça passe par un apprentissage rigoureux de conditions de sécurité qui doivent être comprises et systématiques ? Eh bien, c’est pareil pour l’hypnose : on peut toujours l’apprendre sur le web, mais quid des conditions de sécurité ? Du respect du consultant ? De son objectif ? De ses valeurs ? De ses simples envies, mêmes ? Toutes choses auxquelles j’ai été formée au titre de l’écologie du changement souhaité…

3. L’hypnose est produite par la personne elle-même

L’hypnose est un état auto-induit, un état spécifique de conscience, dans lequel une personne entre régulièrement et spontanément plusieurs fois par jour. On appelle ça la “transe”, et je la définis toujours en cabinet.
Pour que quelqu’un d’autre incite cette personne à y entrer “sur commande”, il lui faut tout d’abord instaurer un climat de confiance – une bulle relationnelle. Puis utiliser un ensemble de techniques qui vont favoriser l’écoute de suggestions comme autant de propositions et d’incitations au changement, toutes respectueuses de l’objectif et de la personne. Ca passe donc par guider avec bienveillance l’attention de cette personne vers ce qu’elle aura elle-même défini lors de l’entretien préalable.

4. L’hypnose ne peut pas forcer quelqu’un à faire quelque chose qu’il ne veut pas faire

Aussi étonnant que ça paraisse, chaque individu a en lui un gardien qui veille au respect de vos valeurs. Si vous êtes pudique, personne au monde ne pourra vous faire vous déshabiller, aussi insistantes que soient les suggestions. Celles-ci finiront par devenir si gênantes que vous ouvrirez les yeux et partirez.

Et c’est très bien comme ça !

5. L’hypnose est mon métier

Et à ce titre, j’ai tout intérêt à respecter la confiance que vous m’accorder en venant à mon Cabinet. Ma formation a duré plus de 500 heures, et je continue à me former, en permanence, plusieurs semaines par an.
Même si l’hypnose, en tant que telle, est une “simple” technique, je m’y applique pour vous guider le long du chemin qui mène à votre objectif : je suis juste une ligne, sur une page blanche, le long de laquelle vous pouvez écrire votre propre histoire de changement…

6. L’hypnose fonctionne bien mieux lorsqu’elle est éthique et respectueuse

C’est pour cela que j’ai signé les chartes déontologiques de mon école de formation et de mon syndicat professionnel : elles engagent ma responsabilité, que j’ai d’ailleurs choisie de garantir par une assurance professionnelle. Je veille tout particulièrement à la pose d’un cadre positif et bénéfique pour chacun de mes consultants, en limitant au maximum ma propre influence et en l’orientant vers l’atteinte des objectifs personnels de chaque client. L’éthique pilote à la fois ma technique et ma pratique, et j’y suis très attachée.

Pour autant, lorsque je vois les débats autour de cet article sur les réseaux sociaux, ça me fait penser à la réaction de l’un de mes collègues suite au débat de cet été sur la possibilité d’encadrement législatif de la pratique de l’hypnose. Pour la réserver au personnel soignant du corps médical… Autant dire que les médecins vont déposer un copyright sur une pratique innée de l’humanité ! Sur les rêves, la création artistique, l’intuition, la religion, la résolution des problèmes, le sport, la rêverie, le jeu, la poésie etc !

Je pense que les consultants sont bien plus capables que ce que tout le monde croit. Ils sauront faire la différence et aller au bon endroit, pour peu qu’on leur en laisse le choix. Or, encadrer la pratique de l’hypnose par une législation spécifique la réservant au seul corps médical supprime ce choix. Nombre de gens ne se sentent pas “malades” : ils veulent juste “aller mieux”, “aller bien”, dépasser une situation bloquée ! Si peu de consultations portent finalement sur des cas pathologiques ou des maux physiques graves… En ce qui me concerne, aucun de mes 200 consultants.

Est-ce vraiment la place des médecins, aux spécialisations si bien définies et déjà insuffisamment nombreux dans certaines régions, de se réserver une telle pratique ? D’autant que leur propre pratique n’a été officiellement reconnue qu’en 2001, date de création de leur diplôme universitaire (entre 80 et 120 heures de formation).

Aux consultants (“patients” et im-patients 😉 ) de se faire leur avis !

Quant à l’hypnose de rue, hypnose souvent apprise de façon “sauvage” avec les videos d’internet, faut-il légiférer ? punir ? interdire ? ou simplement, éduquer plus étroitement en insistant sur les notions de respect de l’individu et de sa volonté, et de l’éthique personnelle ? Car après tout, chaque vidéaste est responsable de sa mise en ligne !
Vaste débat qui rejoint celui du Bien et du Mal…


Picardie : mystérieuse multiplication des cas d’hypnose en pleine rue

Des lycéens pratiqueraient l’hypnose sur leurs camarades. La gendarmerie a lancé une alerte sur Facebook. 

Cas d'hypnose manquant d'éthique, en Picardie ?

Le lycée Lamarck d’Albert (Somme), le 1er octobre 2010. | MAXPPP

Le lycée Lamarck d’Albert (Somme), le 1er octobre 2010. (MAXPPP)

Par Francetv info
Mis à jour le 13/12/2015 | 17:33, publié le 13/12/2015 | 16:07

C’est le cas de trop qui a obligé la gendarmerie de la Somme à publier un message de prévention sur sa page Facebook, le 9 décembre, intitulé “alerte hypnose”. Vendredi 4 décembre, une jeune fille chute subitement sur la voie publique à Corbie (Somme), profondément endormie. Les pompiers interviennent, mais ne parviennent pas à la réveiller. Ses camarades qui l’accompagnent expliquent aux secouristes qu’elle est victime d’un jeu actuellement en vogue dans leur lycée : l’hypnose. Plus réceptive que les autres, la jeune fille s’endort systématiquement dès qu’elle entend le mot “dormir” “s’endormir” ou un claquement de doigt.

“C’est redoutable, les pompiers ont pu s’en rendre compte. Alors qu’elle retrouvait ses esprits, un pompier a claqué des doigts pour la tenir éveillée, ce qui a provoqué son endormissement immédiat”, raconte un gendarme interrogé par le Courrier Picard, samedi 12 décembre. Transportée au centre hospitalier d’Amiens sud, la jeune fille s’est finalement réveillée et a été gardée en observation jusqu’au samedi 5 décembre. Les examens pratiqués n’ont rien révélé d’anormal.”

Un lycéen du lycée Lamarck d’Albert soupçonné

Depuis la rentrée de septembre, les cas signalés se multiplient, rapporte le Courrier Picard, et notamment au sein du lycée Lamarck d’Albert (Somme). Un élève de 1ère y pratiquerait l’hypnose et aurait partagé son savoir avec deux de ses camarades. “C’est impressionnant, je ne sais pas comment il fait, mais il est capable de faire tomber les gens comme des mouches”, raconte ainsi une jeune élève de 17 ans. “Quand on est une fille, ce n’est vraiment pas rassurant.” Un autre, interrogé par le Courrier Picard, est lui aussi inquiet. “Au début c’était marrant, là, ça commence vraiment à devenir lourd, perso, je fais tout pour les éviter.”

Interrogé par le quotidien, le proviseur de l’établissement estime que ces cas d’hypnose ne se déroulent pas au sein de son lycée, mais en dehors et qu’il ne peut donc rien y faire. Le rectorat parle quant à lui d’un “cas isolé”, précisant que “néanmoins, si des élèves pratiquent l’hypnose dans le lycée, ils seront évidemment sanctionnés”.

Ces signalement de personnes sous hypnose ne se limitent pas à Corbie. A Beauvais également, le jeu semble être à la mode. Ainsi, sous le porche d’un habitation voisine du lycée des Jacobins, quatre adolescents jouent eux aussi à ce jeu dangereux, sous les yeux des journalistes du Courrier Picard . Une jeune fille inconsciente est revenue à elle d’un claquement de doigts de son hypnotiseur.