La barrière entre le cerveau et le corps s’amenuise, l’ère de la médecine intégrative et des thérapies inédites s’ouvre

Il vient enfin d’être prouvé ce qu’on savait pourtant depuis longtemps : le cerveau et le corps fonctionnent ensemble, l’un agissant sur l’autre et vice-versa !

Et entre autres, il reste à découvrir comment utiliser le fait que “le cerveau joue un rôle déterminant non seulement dans la genèse de certaines pathologies, mais aussi dans la réponse immunitaire et la guérison“. Probablement d’un point de vue multidisciplinaire, en utilisant à la fois la technologie (Imagerie par résonance magnétique fonctionnelle : IRMf) et neurosciences systémiques, cognitives, computationnelles et cliniques.

Bien que l’article soit un peut technique, vous pourrez y comprendre qu’on peut donc tout à fait utiliser ces interactions neuronales, dans un sens ou dans l’autre, à partir de la transe hypnotique (voir la technique Mirte ici)


Publié le 14 Nov 2023 à 20H00 – Modifié le 14 novembre 2023 Par Laurie Henry

Connexion corps et cerveau - méthode mirte

L’interaction entre le cerveau et le reste du corps, longtemps sous-estimée. Mais il y a environ deux décennies, des scientifiques ont formulé une interrogation audacieuse : le cerveau est-il véritablement isolé ? Les recherches accumulées suggèrent que non. Récemment, elles ont démontré que des affections cérébrales pourraient être influencées par des facteurs périphériques, ouvrant la voie à des traitements innovants et élargissant notre compréhension des maladies neurologiques et de leur gestion clinique.

La compréhension actuelle du cerveau humain subit une transformation fondamentale. Des découvertes récentes remettent en question l’ancienne croyance d’un cerveau opérant en solitaire, dévoilant une interaction dynamique avec le corps. Cette réévaluation scientifique, soutenue par trois études de pointe mise en avant par un éditorial de la revue Nature, suggère des origines somatiques à des troubles longtemps considérés comme purement neurologiques. Le cerveau est donc bien plus lié au corps que nous le pensions auparavant. Ce constat ouvre des perspectives inédites pour le diagnostic et le traitement de pathologies complexes, allant de l’Alzheimer au cancer et même les troubles comportementaux.

Une accumulation de preuves pour une relation corps-cerveau intime

Les recherches récentes révèlent une interaction complexe et bidirectionnelle entre le cerveau et le reste du corps. Des études montrent que des altérations de la flore intestinale pourraient influencer l’apparition de maladies neurodégénératives. C’est le cas pour Parkinson ou la sclérose latérale amyotrophique. De plus, des infections spécifiques pourraient déclencher la maladie d’Alzheimer. Des perturbations durant la grossesse seraient également liées à l’autisme.

Cette influence réciproque s’étend à des symptômes non traditionnellement associés aux dysfonctionnements neurologiques. Par exemple, concrètement, la fièvre est régulée par des neurones qui gèrent la température et l’appétit. Des expériences sur les souris ont démontré que la stimulation de certaines zones cérébrales peut réactiver des réactions inflammatoires antérieures. Ces découvertes suggèrent que le cerveau joue un rôle déterminant non seulement dans la genèse de certaines pathologies, mais aussi dans la réponse immunitaire et la guérison. Et il est de plus en plus évident que les cancers utilisent les nerfs pour se développer et se propager.

La plasticité des synapses dans les gliomes révèle une interaction complexe entre le cerveau et le corps

C’est ce que la recherche menée par Michelle Monje et son équipe a démontré, dans Nature. Les auteurs se sont intéressés aux gliomes, des tumeurs cérébrales parmi les plus agressives. Leur travail a révélé que les cellules neuronales et les cellules tumorales peuvent interagir directement via des synapses. Ces derniers sont des points de contact spécialisés qui permettent la transmission de signaux électriques et chimiques. Ces synapses utilisent des récepteurs AMPA, connus pour leur rôle dans la transmission rapide des signaux excitateurs dans le cerveau.

Ce qui est particulièrement frappant, c’est la découverte que ces synapses sont dynamiques et modifiables. Elles sont un peu comme les synapses qui se renforcent lors de l’apprentissage et de la mémorisation. Les auteurs ont révélé que les synapses tumorales accumulaient les récepteurs AMPA. Le BDNF, molécule essentielle pour la plasticité synaptique dans un cerveau sain, et son récepteur TrkB, sont impliqués. En favorisant ces ajouts de récepteurs, ils augmentent ainsi leur capacité à recevoir des signaux excitateurs, stimulant leur croissance.

Cette découverte suggère que les traitements ciblant le BDNF ou le TrkB empêcheraient le renforcement des synapses tumorales. De fait, ils freineraient la progression de la tumeur. En effet, des expériences sur des modèles animaux ont montré que bloquer cette voie de signalisation peut réduire la croissance des gliomes. Au lieu de cibler les cellules tumorales, on viserait l’environnement neuronal de ces dernières.

Un réflexe cardiaque modulé par le cerveau ?

Un autre lien a été mis en évidence : la voie neuronale provoquant baisse de tension artérielle et évanouissements. L’étude menée par Jonathan Lovelace et ses collègues, également publiée dans Nature, apporte des éclaircissements sur le réflexe de Bezold–Jarisch (BJR), phénomène physiologique pouvant conduire à la syncope.

Les chercheurs ont utilisé des techniques optogénétiques, permettant de contrôler l’activité des neurones avec la lumière. Ils ont activé spécifiquement les neurones sensoriels vagaux reliant le cœur au tronc cérébral. Cette activation a reproduit les symptômes classiques du BJR : hypotension, bradycardie et suppression respiratoire. Ensemble, ils peuvent provoquer une perte de conscience.

Ces résultats fournissent une compréhension plus approfondie des mécanismes neuronaux qui sous-tendent la syncope. Cela pourrait évidemment conduire à de nouvelles approches pour traiter les troubles neurologiques associés à ce réflexe. Cette étude appuie encore un peu plus l’idée des interactions complexes entre le corps (ici le cœur) et le cerveau.

Pour approfondir cette compréhension, une collaboration renforcée entre chercheurs de disciplines variées est essentielle. L’objectif ultime est d’analyser cette interaction chez l’être humain. Cela implique l’utilisation de techniques d’imagerie avancées, comme l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf).

Le potentiel unificateur de l’IRMf entre cerveau et corps

L’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) est une véritable fenêtre ouverte sur le cerveau en activité. Elle détecte les variations de débit sanguin associées à l’activité neuronale, révélant les zones cérébrales impliquées dans différents processus mentaux. Cette technologie a révolutionné notre capacité à observer le cerveau sans recourir à des méthodes invasives.

Malgré son potentiel, l’IRMf est souvent exploitée séparément des avancées dans les domaines connexes des neurosciences. Emily Finn et ses collaborateurs, dans leur publication dans la revue Nature, mettent en lumière cette lacune. Ils préconisent une utilisation de l’IRMf qui s’inscrit dans une démarche interdisciplinaire, en la combinant avec les neurosciences systémiques, cognitives, computationnelles et cliniques. Cette intégration permettrait de construire un tableau plus complet des fonctions cérébrales et de leurs dysfonctionnements.

En reliant l’IRMf aux autres sous-disciplines, on pourrait mieux comprendre comment les circuits neuronaux influencent la cognition et le comportement. Les médecins pourraient également appréhender comment ces processus sont modifiés dans diverses conditions cliniques. Une telle approche holistique pourrait également faciliter le développement de modèles computationnels plus précis. Ces derniers simulent les processus cérébraux et prédisent les réponses aux traitements. En d’autres termes, l’IRMf est un pont entre les disciplines, permettant d’améliorer les interventions cliniques pour divers troubles neurologiques.