Etre perfectionniste, le pire des défauts

On est parfois très perfectionniste. Parce qu’on voudrait être parfait. Pour qu’on nous aime, pour qu’on soit le meilleur, pour qu’on soit simplement bon, pour qu’on atteigne le but fixé, pour… (et ce n’est pas les raisons qui manquent !)

Mais qu’est-ce que c’est difficile, d’être parfait ! Ca met de pression de fou ! Et quand on y arrive enfin, plus question de rater : il faut continuer à être parfait. Et là, patatras ! On entame un cercle vicieux qui finit par nous faire échouer : charge mentale, stress, anxiété, prise de poids, burn out etc… Alors, et si chercher à atteindre la perfection était finalement un défaut ?


Être perfectionniste, le pire des défauts

Par Emmanuelle Ringot
Publié le 06/06/2018 à 15:04

perfectionniste le pire des defauts

S’il y a bien un défaut à ne pas confesser en entretien d’embauche, c’est le perfectionnisme. Outre son utilisation galvaudée par bon nombre de candidats, ce trait de caractère cache également de nombreuses faiblesses et peut entraîner un mal-être psychique général.

Perfectionniste. C’est le trait de personnalité le plus cité en entretien quand un recruteur demande avec malice quels sont les trois défauts majeurs d’un candidat. Cette réponse, en plus d’être galvaudée, pourrait avoir d’autres implications bien plus importantes sur le comportement et le psychisme du salarié.

Interrogée par le site américain Quartz, Ambra Benjamin, responsable recrutement chez Facebook, commence par alerter : “ne sous-estimez pas le nombre de fois où votre recruteur a déjà pu entendre la réponse ‘je suis trop perfectionniste’“. Avant d’ajouter, “Quand je reçois des gens qui me servent le coup du ‘je suis trop perfectionniste’, je ne peux pas m’empêcher de trouver ça cruellement hypocrite“.

Le perfectionnisme, le mal du siècle ?

Outre la fausseté d’une telle réponse, être perfectionniste est en réalité un défaut qui peut avoir un impact direct sur le comportement et le travail d’un salarié, et plus généralement sur sa vie entière.  “Ne pas savoir déléguer rime souvent avec une incapacité à prioriser les tâches à accomplir et une inhabilité à travailler en équipe. Le perfectionnisme est souvent source de procrastination“, rappelle ainsi Ambra Benjamin. Interviewée par la BBC, Katie Rassmussen, chercheuse à la West Virginia University, va plus loin en avançant l’idée que le perfectionnisme serait un “problème de santé publique”. “Nous commençons à parler de la façon dont le perfectionnisme peut s’appréhender comme une épidémie”, explique-t-elle.

Le perfectionnisme peut s’appréhender comme une épidémie

Une étude menée par Andrew Hill de l’Université York St John et Thomas Curran de l’Université de Bath et publiée le 2 janvier 2018 dans la revue Psychological Bulletin, vient corroborer cette idée que la notion de perfectionnisme constituerait aujourd’hui le mal de toute une génération, baignée dans la concurrence du néolibéralisme et de la méritocratie. Par définition, le perfectionnisme est une combinaison de normes personnelles excessivement élevées et d’autocritique sévère. Une pression excessive qui peut ainsi générer de graves difficultés psychologiques, selon les chercheurs de l’étude, qui soulignent que leurs découvertes pourraient expliquer (en partie) le défi croissant de santé mentale qui affecte actuellement les jeunes. “Cela signifie plutôt que nous devenons plus malades, plus tristes et même que nous sabotons notre propre potentiel”, juge Katie Rassmussen. D’ailleurs, des travaux antérieurs de l’équipe de recherche avaient mis en lumière la relation croissante entre le perfectionnisme et l’épuisement professionnel.

Une concurrence accrue

Cette nouvelle étude menée auprès de plus de 40 000 étudiants universitaires américains, canadiens et britanniques de 1989 à 2017, a montré que les taux de perfectionnisme ne cessaient d’augmenter. Ainsi, les jeunes attachent de plus en plus une importance irrationnelle à être parfaits, à avoir des attentes irréalistes envers eux-mêmes et à être très autocritiques. La concurrence entre les jeunes ne cesse de s’accroître et ce, dans tous les domaines de leurs vies : professionnel, privé, familial, etc. Une injonction à l’excellence et à surplomber les autres qui font naître des malaises allant du syndrome de l’imposteur à l’épuisement psychologique généralisé.

Et aux auteurs de l’étude de conclure, “nous espérons que les organisations directement responsables de la protection du bien-être des jeunes, comme les écoles et les universités, et les décideurs qui façonnent les environnements dans lesquels ces organisations opèrent, résistent à la promotion de la compétitivité aux dépens de la santé psychologique des jeunes“.

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